Ma langue
Abus de langage, dit ma langue. C'est sans doute par abus de langage que je dis ma langue. Je ferais mieux de dire abus de langue, me dis-je : cette langue ne m'appartient nullement. Il est vrai que je n'en ai aucune autre, que si je me mets à parler (ici ou ailleurs), c'est cette langue qui me vient. J'en abuse : je fais comme si je la parlais. Cet abus est parmi les gens qui parlent cette langue la chose la plus communément partagée : les gens qui parlent cette langue font comme si elle était la leur, une sorte d'abus commun, qui fait le commun de cette langue et le commun de ces gens, une sorte de communauté d'abus, d'usage, à laquelle pourtant je n'appartiens nullement.
Je ne m'en plains pas du tout.