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La chambre de Gaspard

11 décembre 2018

Ma langue

Abus de langage, dit ma langue. C'est sans doute par abus de langage que je dis ma langue. Je ferais mieux de dire abus de langue, me dis-je : cette langue ne m'appartient nullement. Il est vrai que je n'en ai aucune autre, que si je me mets à parler (ici ou ailleurs), c'est cette langue qui me vient. J'en abuse : je fais comme si je la parlais. Cet abus est parmi les gens qui parlent cette langue la chose la plus communément partagée : les gens qui parlent cette langue font comme si elle était la leur, une sorte d'abus commun, qui fait le commun de cette langue et le commun de ces gens, une sorte de communauté d'abus, d'usage, à laquelle pourtant je n'appartiens nullement.

Je ne m'en plains pas du tout.

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11 décembre 2018

La langue

Suis-je seul dans ma langue (ici), en elle, avec elle ? Il est certain que je parle (ici). Il est certain que je parle seul (ici). Il n’est pas du tout certain que je sois (ici), en revanche. Je parlerais sans être (ici) ? Autrefois j’ai voulu être dans ma langue : la parler à partir de moi-même, que ma langue devienne une part de moi-même, que je devienne, moi-même, une part de la langue que je parle. La situation est désormais un peu plus claire : je ne suis ni ne serai jamais dans ma langue. Je ne suis pas seul dans ma langue, c’est elle, ma langue, qui est seule à l’intérieur d’elle-même.

 

Je la regarde seulement parler.

11 décembre 2018

Le silence

J’aime marcher, voir, me promener. En fait (dans les faits), en réalité (je veux dire dans le réel, je veux dire dans le réel que je connais), j’aime de moins en moins lire, parler, écouter mes semblables. Quand je marche, je regarde. Quand je regarde (en marchant), je vois. Je vois même sans regarder vraiment (quand je marche). Je n’entends pas dire (ici) ce que je vois quand je marche : quand je vois (en marchant) je ne vois pas dans les mots (je ne vois ni choses ni Êtres, ni objets ni paysages, ni figures ni personnages).

 

Le silence est toujours neuf.

11 décembre 2018

Mon lecteur

Je n’ai en un sens écrivant jamais ignoré mon lecteur, lequel absent ne me dit rien, cependant est là (ailleurs) au même titre que moi (là ailleurs absent ne disant rien). La langue n’est essentielle qu’à l’intérieur d’elle-même. Je ne suis pas insensible à la langue (je ne suis pas insensible aux hommes, je ne suis pas insensible à mon lecteur, je ne suis pas insensible à moi-même), j’ai même très longtemps fréquenté mes semblables (de plusieurs manières : physiquement, livresquement, virtuellement).

 

Maintenant j’aime marcher, me promener, voir.

11 décembre 2018

Moi-même

Je n’ignore pas les hommes : ils sont là. Les hommes sont là devant moi (depuis toujours), depuis toujours ils sont là (devant moi). Ils sont devant moi ? Ils sont en moi. Ils sont en moi (dans mes yeux, dans mes oreilles, dans mon ventre, dans mon cerveau, dans ma langue). Je parle et je parle une langue humaine, je suis un homme. Cette langue ne me permet ni de comprendre les hommes ni de me comprendre moi-même (je suis un homme). Je ne cherche plus à comprendre les hommes : je ne cherche plus à me comprendre moi-même.

 

Je ne cherche plus à me comprendre moi-même.

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11 décembre 2018

Les hommes

Je n’ai je crois devant moi aucun modèle, que cette langue, que ma carcasse, que mon passé. Cette fois je n’ignore pas les hommes, leurs royaumes, leurs démocraties, leurs guerres. Les hommes ? Je ne les comprends pas. Je les écoute, je les regarde, il m’arrive de leur parler, mais je ne les comprends pas. Se comprennent-ils eux-mêmes ? Se comprennent-ils entre eux ? Je l’ignore. Ne les comprenant pas, j’ignore s’ils se comprennent (eux-mêmes, entre eux). Sans doute se comprennent-ils (eux-mêmes, entre eux), me dis-je, mais rien n’y fait : je ne les comprends pas, je ne parviens pas à les comprendre, je ne suis jamais parvenu à les comprendre.

 

Je ne cherche plus à comprendre les hommes.

10 décembre 2018

Début

J’ai par la gentillesse d’un copain français de nouveau l’usage d’un ordinateur portable, j’ouvre le traitement de texte et naturellement je dois me faire au clavier dit français, je m’y ferai (grâce à la plasticité de ce qu’ils appellent mon cerveau).

 

J’ouvre donc une nouvelle fenêtre ici.

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